Le Pernambouc

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Le pernambouc - Paubrasilia echinata

ArbreMusique logo seulInitiative Arbres et Musique a pour objectif de soutenir les actions de plantations de pernambouc initiées depuis début 2000 par les associations de l'IPCI. Cette espèce emblématique et indissociable de l’archet est menacée par une déforestation grandissante au Brésil. Son utilisation durable par les archetiers, accompagnée de programmes ambitieux de plantations, est la clé de la survie de cette espèce en danger. En France et en Europe, Initiative Arbres et Musique travaille main dans la main avec IPCI France-Europe pour récolter des fonds et financer de nouveaux projets de plantations.


Protéger les espèces menacées et les traditions musicales - 2025

Le document scientifique "Protéger les espèces menacées et les traditions musicales" de Silke Lichtenberg (Institut de gestion des technologies et des ressources dans les régions tropicales et subtropicales, TH-Köln-Université des sciences appliquées, Cologne) aborde les défis liés à la conservation des espèces menacées utilisées dans la fabrication d'instruments de musique, avec un focus particulier sur les enjeux écologiques, culturels et sociaux associés à des espèces comme le pau-brasil.

Résumé :

Ce travail explore la relation entre les traditions musicales, la fabrication d'instruments et la conservation des espèces menacées, particulièrement celles utilisées pour créer des instruments en bois et autres matériaux naturels. Le projet discute des implications de la réglementation CITES (Convention sur le commerce international des espèces menacées de faune et de flore sauvages), des défis à surmonter pour assurer la survie de ces espèces tout en préservant les traditions culturelles et musicales. L'accent est mis sur des espèces spécifiques comme le pau-brasil (Paubrasilia echinata), utilisé dans la fabrication des archets pour instruments à cordes, et la manière dont leur statut d'espèce menacée influence la pratique musicale à l'échelle mondiale.

Principaux points du document :

1 - Systèmes sociaux-écologiques et culturels :

- Les écosystèmes musicaux sont des systèmes sociaux-écologiques complexes qui relient la culture musicale, les traditions artisanales et les espèces végétales et animales utilisées pour la fabrication des instruments.

- Ces systèmes sont confrontés à des menaces liées à la dégradation des écosystèmes, au changement climatique et à l'exploitation non durable des ressources naturelles.

2 - La réglementation CITES et ses impacts :

- Bien que CITES vise à protéger les espèces menacées par le commerce international, ses régulations peuvent avoir un impact sur la continuité des traditions musicales, en particulier lorsqu'elles concernent des espèces utilisées dans les instruments de musique.

- L'étude met en lumière le cas du pau-brasil, une espèce au cœur de la fabrication d'archets pour instruments à cordes, et discute des implications d’un éventuel passage de cette espèce de l’Annexe II à l'Annexe I de CITES.

3 - Alternatives aux espèces menacées :

- L'article examine les solutions possibles pour remplacer certaines espèces menacées par des alternatives, mais alerte sur le fait que cela pourrait entraîner des conséquences imprévues si les propriétés acoustiques et physiques des matériaux ne sont pas identiques.

- Des méthodes comme l’identification par code-barres ADN et des tests isotopiques sont proposées pour assurer la transparence des chaînes d'approvisionnement et éviter les erreurs d’identification des espèces.

4 - Le cas du Pau-Brasil :

- Le pau-brasil, symbole de la biodiversité brésilienne et utilisé depuis des siècles pour la fabrication de matériaux musicaux de haute qualité, est en danger en raison de la surexploitation et de la perte de son habitat naturel.

- Malgré la réglementation de CITES, l'exploitation continue du pau-brasil reste un défi majeur pour sa conservation. L'extension de son statut d'espèce menacée pourrait aider à réduire ce risque, mais des efforts supplémentaires sont nécessaires pour assurer sa régénération et sa gestion durable.

5 - Vers des écosystèmes musicaux durables :

- La publication appelle à une approche globale qui intègre la conservation des espèces et des écosystèmes, la gestion durable des forêts, la diversification des matériaux utilisés dans la fabrication des instruments et la préservation des traditions culturelles.

- Des initiatives comme la création de plantations de pau-brasil et de bois de rose, ainsi que des programmes de conservation communautaire, sont des exemples de solutions proposées pour concilier écologie et culture musicale.

Conclusion :

La publication met en évidence la nécessité d’une approche intégrée pour préserver à la fois les espèces menacées et les traditions musicales. Cela implique des efforts coordonnés entre les gouvernements, les producteurs d'instruments, les musiciens et les chercheurs pour créer des systèmes de production durables, transparents et respectueux de l'environnement, tout en continuant de soutenir la richesse des patrimoines culturels liés à la musique.

TÉLÉCHARGER LA PUBLICATION - VERSION FRANÇAISE - ENGLISH VERSION


Enjeux de la facture instrumentale – Janvier 2025 - Focus sur le pernambouc et les archets

Le document ci-dessous a été rédigé par la CSFI et l'IPCI France-Europe dans le cadre de la préparation à la 78ème session du Comité Permanent de la CITES qui s'est déroulé du lundi 3 février au samedi 8 février 2025 à Genève. Le pernambouc était à l'ordre du jour de ce comité.

À moins d’un an de la prochaine CoP de la CITES prévue en novembre 2025, les archetiers et tous les professionnels des instruments de musique appellent à la mobilisation pour que soient renforcés les engagements pris lors de la CoP19. Notre objectif doit, nécessairement, être double :

- aller au bout du plan d'action souhaité par le Brésil et adopté par la CITES le 27 novembre 2022 (Décisions CITES 19.249 à 19.253), et

- construire les conditions qui permettront une sortie durable de crise et la mise en place d’un cadre juridique stable pour l’ensemble des acteurs du monde musical (musiciens, archetiers et luthiers, ...).

L’avenir de l’archèterie est intimement lié à la préservation et à la conservation du pernambouc, tant cette activité dépend de cette espèce. L’inverse est vrai également :  le bon état de conservation du pernambouc peut être favorisé par une forte mobilisation des archetiers et des musiciens en faveur de cet arbre. C’est le sens que nous donnons à notre action depuis maintenant plus de 25 ans.

Il nous faut continuer de travailler conjointement à la mise en place d’un cadre réglementaire permettant un commerce de la ressource bois durable et favorable à la préservation des populations naturelles de cette espèce. A cette fin, tous les moyens disponibles devront être utilisés, notamment pour assurer le plus haut niveau de traçabilité. Et, le cas échéant, il nous faudra conjointement créer les outils nouveaux requis pour atteindre ces objectifs.

Il faut, en particulier, que la communauté internationale soutienne le Brésil pour que les actions de police réalisées par les autorités brésiliennes, notamment depuis 2022, permettent d’éradiquer le commerce illégal qui affecte cette espèce. Sans cela, il ne nous sera pas possible d’aller de l’avant.

Il est indispensable que le Brésil maîtrise la valorisation d’une filière légale contingentée et strictement contrôlée pour que l’archèterie artisanale puisse bénéficier d’un approvisionnement légal en pernambouc.

Il faut également que pouvoirs publics, scientifiques et parties prenantes travaillent en synergie pour accompagner la structuration d'une filière d'exploitation durable du bois issu de programmes de replantation. Il s’agit d’une condition sine qua non pour garantir l’avenir du pernambouc en tant qu’espèce et d’une orientation stratégique cruciale pour que tous s'engagent en faveur de la protection et de la régénération de la Mata Atlantica en sanctuarisant des zones protégées, là où cela est encore possible.

Pour en arriver là, nous devons travailler conjointement et partager une ambition forte qui doit être portée par les professionnels du secteur des instruments de musique, l'ensemble du monde musical et les pouvoirs publics.

Le recours à l’Annexe I de la CITES entraînerait une prohibition définitive de l’utilisation du pernambouc et entraverait gravement l'utilisation des millions d'archets existants qui ont été produits depuis plus de 250 ans. L’Annexe I de la CITES n'est en aucun cas une réponse appropriée cette ambition.

En 2022, lors de sa 19ème session, la Conférence des Parties à la CITES a examiné une proposition visant à transférer le pernambouc de l’Annexe II à l’Annexe I de cette Convention. À l’issue des débats, il a été décidé de maintenir cette espèce à l’Annexe II (commerce autorisé et contrôlé), un plan d’action a été adopté pour la période 2022-2025 et il a été convenu que le sujet serait réexaminé lors de la CoP20 (Samarcande, Ouzbékistan, novembre-décembre 2025).

La profession s'est engagée à respecter les Décisions adoptées par la CoP19 (Panama, novembre 2022) pour préserver le pernambouc tout en garantissant la diffusion et le partage de la musique.

Le tableau ci-après présente succinctement les principales actions d’ores et déjà réalisées par les professionnels de la facture instrumentale pour contribuer à la mise en œuvre de certaines actions du “plan d’action pernambouc” approuvé par la CoP19 de la CITES :

Décision CoP19

Réalisations IPCI depuis la CoP19

L’évaluation de la pertinence de la mise en place d’un système de traçabilité rigoureux pour chaque archet produit (Décisions 19.249 et 19.250)

·       L’IPCI a répondu et collaboré avec Sofia Hirakuri dans le cadre de son enquête diligentée par le Secrétariat Général de la CITES.

·       Proposition de marquage des nouveaux archets produits corrélé aux stocks pré-Convention enregistrés ; ces stocks étant la pierre angulaire d’un système rigoureux de traçabilité.

L’enregistrement des stocks de pernambouc existant dans le monde entier (Décision 19.251.b)

État des stocks promu par l’IPCI auprès des autorités CITES

La sensibilisation des acteurs du secteur - des fabricants aux musiciens - sur l’importance de la conservation durable des ressources (Décision 19.252.a et b)

·       La CSFI et l’IPCI sont intervenues publiquement à plusieurs reprises chaque année afin de sensibiliser les acteurs du secteur ainsi que le grand public sur ces sujets.

·       Les sites internet de la CSFI et de l’IPCI France-Europe relaient également toutes les informations en lien avec les problématiques de conservation et d’utilisation durable des ressources.

La collaboration avec les autorités locales et internationales pour garantir une exploitation légale et responsable du bois

·       IPCI France-Europe a créé en 2023 une “bourse de bois ” collaborative pour ses membres afin de faciliter la transmission, entre archetiers, de stocks pré-Convention dûment enregistrés en tant que tels, et permettre ainsi de sécuriser la continuité de l'activité.

·       Des représentants de l’IPCI ont participé au Symposium National d’Écologie "Conservation et production durable du pau-brasil qui s’est tenu à Ilhéus, Bahia, Brésil, les 05 et 06 décembre 2024.

Ce symposium a réuni de nombreux chercheurs brésiliens ainsi que des autorités locales et nationales brésiliennes

 

La préservation de la ressource sauvage

Il n’est en aucun cas question d'abattre et d’utiliser des arbres qui poussent à l’état sauvage. La législation nationale brésilienne n’autorise pas l’extraction du bois de pernambouc de son habitat naturel. (Source F-CoP19-Prop-49.pdf) et l’IPCI ainsi que la CSFI soutiennent ces mesures sans réserve. En effet, la Loi fédérale no 11 428 de 2006 et le Décret fédéral no 6 660 de 2008 interdisent d’ores et déjà l’exploitation d’espèces indigènes figurant sur la Liste officielle des espèces menacées de la flore brésilienne dans la Forêt Atlantique, et le pernambouc est inscrit sur cette liste.

En outre, le pernambouc étant inscrit à l’Annexe II de la CITES, toute exportation de pernambouc depuis le Brésil est soumise à permis d’exportation CITES. Permis d’exportation que les autorités CITES du Brésil ne délivrent pas compte tenu des dispositions réglementaires nationales susmentionnées.

Donc, très clairement, dans la pratique les exportations de bois depuis le Brésil sont d’ores et déjà quasiment impossibles.

La question du bois de replantation

Le point qui doit véritablement être traité, dans l’objectif de mettre en place une filière d’approvisionnement légal et durable, et pour lequel des avancées sont indispensables est celui du bois issu de programmes de plantation.

Depuis le début des années 1970, des programmes de replantation ont été développés au Brésil pour cette espèce. Par exemple, la Fondation Funbrasil revendique la propagation de plus de 3 000 000 d’arbres de cette espèce du seul fait de son action.

Pour leur part, les archetiers (à travers l’IPCI - International Pernambuco Conservation Initiative) ont initié et financé depuis 2000 des programmes de replantation de pernamboucs en partenariat avec des associations locales et des organisations gouvernementales au Brésil. Et cela, avant même que le commerce du pernambouc ne soit réglementé par la CITES.

Les initiatives prises dans le cadre de l’IPCI depuis plus de 25 ans visent à reconstituer des zones forestières dégradées. Elles ont également pour objectif de créer les conditions requises pour qu’une exploitation raisonnée de cette ressource soit possible, notamment en lien avec des programmes de développement local, et de promouvoir une telle approche proactive. Par exemple, le pernambouc est souvent planté en association avec des cacaoyers, qu’il protège en leur fournissant l’ombre nécessaire à leur croissance. Parallèlement, des travaux scientifiques ont été menés pour améliorer les connaissances sur cette espèce essentielle à l'archèterie.

En 25 ans, l’action de l’IPCI a permis la plantation de plus de 340 000 pernamboucs. Ce chiffre est particulièrement significatif lorsqu’on le compare aux besoins annuels de l’archèterie artisanale mondiale, qui s’élèvent à quelques dizaines d'arbres (environ 20 m3 de bois d’œuvre). Ce fort investissement de la profession démontre que celle-ci inscrit résolument son action, depuis un quart de siècle, dans une démarche responsable et durable pour assurer la préservation du pernambouc.

Concernant très précisément ce sujet du bois de replantation, la CoP19 de la CITES (Panama, novembre 2022) a invité les organisations gouvernementales, intergouvernementales et non gouvernementales ainsi que les autres entités à travailler avec le Brésil « au recensement des plantations brésiliennes existantes de Paubrasilia echinata pouvant être considérées de code de source A ou Y[1], en vue d’établir une chaîne d’approvisionnement durable » (Décision 19.252.a.ii).

Cet axe de travail revêt une importance majeure au regard de l’objectif de mettre en place une filière d’approvisionnement en bois de pernambouc dûment contrôlée par les autorités.

En effet, en dépit de l’existence de nombreux programmes de plantation de pernamboucs au Brésil (plus de 3 500 000 d’arbres de cette espèce ont été plantés au Brésil depuis le début des années 1970), l’existence de ces arbres n’est aujourd’hui pas reconnue. Cette lacune est particulièrement dommageable dans le contexte de la CITES, car une proportion significative de ces arbres est précisément éligible au code source Y, et une autre partie d’entre eux pourrait, éventuellement, être éligible au code source A. Ces arbres constituent donc la base sur laquelle il est possible de mettre en place une chaîne d’approvisionnement durable selon les termes retenus par la CoP19 de la CITES.

Cette option est d’autant plus porteuse d’espoirs, à la fois en vue de la conservation du pernambouc et de l’avenir de l’archèterie, que le pernambouc croît de façon relativement rapide, notamment dans les zones de Cacao Cabruca[1]. Ces arbres pourraient donc non seulement offrir une solution durable pour l’archèterie, mais aussi apporter la démonstration qu’il est possible de préserver les populations naturelles de pernamboucs et d’utiliser raisonnablement cette ressource sur la base des arbres plantés dans l’objectif de leur utilisation future.

La CSFI et l’IPCI se mobilisent donc résolument pour apporter leur concours aux autorités brésiliennes dans le cadre de la mise en œuvre de la Décision CITES 19.252.a.ii susmentionnée.

[1]       La Cacau Cabruca est un système d’agroforesterie dans lequel des cacaoyers sont plantés à l’ombre d’arbres d’une forêt native éclaircie.

[1]       Le code source A CITES est utilisé pour désigner les spécimens qui répondent à la définition "plantes reproduites artificiellement". Le code source Y, quant à lui est utilisé pour désigner les spécimens qui répondent à la définition "plante obtenue par production assistée"


Conclusion

La préservation du pernambouc et la pérennité de l’archet de qualité reposent sur une stratégie collective et durable, incarnée notamment par la poursuite et l'amélioration du plan d'action adopté lors de la CoP19 de la CITES en novembre 2022. Ce plan représente la meilleure chance pour protéger cette essence emblématique tout en soutenant les savoir-faire exceptionnels des archetiers et l'univers musical dans son ensemble.

Plutôt qu’un classement en Annexe 1, qui serait source de blocages administratifs et économiques tout en risquant de décourager les initiatives de replantation, il est impératif de renforcer les engagements pris.

Cela implique :

- La structuration d'une filière légale et traçable pour l'exploitation durable des bois de plantation ;

- Le soutien international aux efforts de conservation de la Mata Atlantica et à la régénération de ses écosystèmes ;

- La mise en œuvre rigoureuse des engagements pris à la CoP19, y compris les inventaires des ressources et le contrôle du commerce illégal.

Le maintien du pernambouc en Annexe II, associé à des actions ambitieuses pour structurer et valoriser les replantations, permettra de concilier protection de l’espèce et vitalité de la musique. Ce cadre offre une voie pragmatique et réaliste pour garantir à la fois la survie de cet arbre unique et celle des métiers d’art qui lui sont indissociables. Ensemble, archetiers, musiciens, pouvoirs publics et communauté internationale doivent continuer à œuvrer pour un avenir où tradition, durabilité et excellence artistique cohabitent harmonieusement.

Liens utiles :  IPCI France-Europe  - CSFI

Contact

Initiative Arbres et Musique

L'association fédère les professionnels de la facture instrumentale et des métiers du bois afin de se donner les moyens de réfléchir et d'agir pour la Conservation, l’Étude et la Valorisation des Bois de Lutherie et de la Facture Instrumentale.

9, rue Saint-Martin M° Châtelet
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